• Recopié du blog de Judith Bernard, c'est tellement juste!

     

    Me voici donc sommée de m’expliquer : de m’expliquer, en tant que signataire du M6R, en tant que membre du Comité d’Initiative de ce mouvement, sur ma position favorable au tirage au sort pour la désignation de la Constituante, et sur mon « indulgence avec Chouard et sa mouvance », qui est supposée être une complaisance avec Alain Soral et ses discours délirants.

    Le tirage au sort est désormais suspect ; voilà plusieurs fois qu’il est soupçonné d’être l’ingrédient d’un projet « fasciste ». La chose pourrait faire rire ceux qui découvrent cette polémique, elle est pourtant à pleurer tant elle procède d’un hystérique refus de penser selon les règles de la plus élémentaire rationalité. Pascale Fautrier, dans le papier où elle m’intime de me justifier, et même de démissionner des instances du M6R où je suis engagée, affirme en effet ceci : « Il y a quelque chose dans le tirage au sort qui a à voir avec ce raccourci anti-rhétorique qu'est le fascisme - auquel leurs partisans feraient bien de réfléchir. »

    Reprenons donc les éléments du raisonnement, puisqu’on nous enjoint de réfléchir : ceux qui militent pour le tirage au sort sont pour la plupart engagés depuis longtemps dans une réflexion sur les institutions politiques. Ils observent que la « crise » où la France, comme d’autres démocraties occidentales, est plongée depuis des décennies ne trouve pas de réponse du côté d’un corps politique manifestement plus empressé à servir les intérêts du capital qu’à servir l’intérêt général. Cette incurie politique est essentiellement liée à la nature de nos institutions, et d’abord à la mère de toutes : la Constitution. Je l’écrivais dans ma déclaration d’adhésion au M6R, cette Constitution doit être réécrite, et cette fois elle doit être écrite par le peuple, et pour le peuple. Seul un processus constituant citoyen pourra instituer la puissance populaire qui passe par quelques règles élémentaires : la révocabilité des élus, l’interdiction du cumul des mandats, la reddition des comptes, le référendum d’initiative citoyenne, règles élémentaires, mais peu susceptibles d’être écrites par des élus qui n’y verraient (à juste titre) que contraintes limitant leur prospérité et leur carrière.

    S’il faut des citoyens et non des élus pour écrire ces règles, la question de leur mode de désignation se pose : le tirage au sort se présente, parmi d’autres options, comme une solution raisonnable, expérimentée ici et là sur la planète - sans avoir précipité les peuples qui s’y étaient risqués dans le péril fasciste. Et l’on voit bien pourquoi : le tirage au sort repose sur la reconnaissance d’une absolue égalité entre tous les citoyens. C’est un outil parfaitement aveugle aux conditions de classe, d’origine, de religion ou de sexe, et la plus ferme garantie qui soit contre toute tentative de discrimination. En cela il est l’antidote d’un projet fasciste - volontiers porté, lui, sur la désignation d’une communauté jugée coupable, et désignée à l’opprobre ou à l’extermination. En outre, en confiant l’écriture des règles de la démocratie au peuple, dans l’hypothèse d’une Constituante tirée au sort, il se donne comme projet d’instituer la souveraineté populaire, enfin à même de se protéger des abus de pouvoir : tandis que le fascisme repose sur le culte d’un chef omnipotent, les règles auxquelles les militants du sort aspirent consistent toutes dans la limitation des pouvoirs des gouvernants, afin que nulle capture fasciste des forces de l’Etat ne soit possible. Le tirage au sort est donc, à ce titre également, un antidote au fascisme, et non son allié. Ceci est pour les principes de philosophie politique qui sous-tendent la vision portée par les militants du sort.

    Cela devrait suffire, mais il faut apparemment se positionner sur Soral, sur qui se focalisent désormais les controverses qui traversent actuellement le débat : cette polarisation autour d’un seul homme est absurde et regrettable, mais puisqu’il faut lever le malentendu – les militants du sort étant désormais accusés d’être des « soraliens » déguisés, ayant entrepris de « noyauter » le mouvement pour la 6ème République avec une idéologie d’extrême-droite (et je redis que c’est irrationnel puisque les militants du sort refusent catégoriquement toute figure de « chef » ainsi que tout projet discriminatoire, qui sont les ingrédients constitutifs de cette idéologie toxique), alors je vais le dire : Soral produit un discours que j’exècre. Les relents antisémites, sexistes et homophobes qui émanent de ses allocutions suffisent à discréditer pour moi sa position politique, qui me paraît délirante : parce qu’il tend à la discrimination d’une communauté jugée inférieure (les « pédés ») ou d’une autre jugée dangereusement puissante (les juifs), parce qu’en outre il appelle à un « despotisme éclairé » de sinistre augure, il incarne à mes yeux un projet de société haïssable, et absolument à l’opposé de la démocratie exigeante, réelle et non pas seulement invoquée, pour laquelle je milite. Je l’écris sans peine – et pourtant je m’inquiète qu’il faille désormais se prêter à ce rituel de la condamnation publique de Soral pour s’acheter un certificat de légitimité à participer au débat public.

    C’est essentiellement parce qu’Etienne Chouard a jusqu’à présent refusé d’en passer par ce rituel de condamnation publique qu’il est accusé d’être un soralien déguisé.  Qu’il ait montré à l’égard de Soral une coupable indulgence, en le qualifiant, quand on l’interrogeait sur lui, de « résistant », sans dénoncer vigoureusement son antisémitisme, est une chose certaine : je l’ai maintes fois interpellé là-dessus, et nous sommes nombreux à lui avoir demandé de clarifier ses positions d’une manière qui ne permette plus de malentendu. Cette indulgence avec l’homme, en effet problématique, ne doit cependant pas être prise pour une complaisance envers les idées fascisantes dont Soral est l’expression : il n’y a pas trace chez Etienne Chouard de la moindre orientation antisémite, homophobe, sexiste, ni la moindre fascination pour une société assujettie à un chef – puisque, comme je le répète inlassablement, en militant du tirage au sort il met au dessus de tout le refus de toute discrimination, et l’aspiration à un contrôle citoyen de tous les pouvoirs.

    D’une manière générale, il est urgent que le débat sur le tirage au sort, et plus généralement sur les procédures envisagées pour la désignation de la Constituante (mixte d’élection et de tirage au sort, écriture participative à l’échelle de toute la société par la voie des outils numériques dont nous disposons désormais…) ait lieu dans des conditions dignes de son importance. C’est-à-dire sans que cette idée, en soi insoupçonnable de dérive totalitaire, soit entachée par des amalgames calomnieux ou des articles diffamatoires quant aux personnes qui s’en font les porte-parole. Ce qui est en jeu ici est la réflexion sur la refondation d’une démocratie qui instaure enfin réellement la souveraineté populaire : c’est un combat historique, qui mérite mieux que les invectives personnelles, d'abjectes calomnies, et cette sorte de chasse aux sorcières que d’aucuns semblent vouloir remettre au goût du jour, déguisant sous les oripeaux d’une lutte prétendument « antifasciste » le refus d’un débat authentiquement démocratique.

     


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  • Décidément, elle s'exprime bien cette nana. Et je partage sa déception quant aux revirements de Chouard par rapport à Soral.

    Je pense que Chouard est un pur intellectuel qui est largement dépassé par la polémique qu'il a créé, en refusant de renier Soral, malgré la pestilence de ses idées.

    Ci-dessous la dernière mise au point de J.Bernard sur le site d'Arrêts sur Image:

     

    Tergiversations de Chouard: J.Bernard prend ses distances d'avec ChouardTergiversations de Chouard: J.Bernard prend ses distances d'avec Chouard

    Je n'ai pas de "proximité idéologique" avec Etienne Chouard
    Retour sur ma coupable naïveté
    http://www.arretsurimages.net/articles/2014-12-02/Je-n-ai-pas-de-proximite-ideologique-avec-Etienne-Chouard-id7271

    Après notre article du 29 novembre, qui la mettait en cause, Judith Bernard, directrice de la publication du site Hors Série, adossé à @si, nous a adressé cette mise au point, dans laquelle elle prend clairement ses distances avec Etienne Chouard, dont elle dénonce "l'alliance ostensible" avec Alain Soral.

    Les engagements que j’ai pris dans un mouvement politique – le Mouvement pour la 6èmeRépublique, dont je suis signataire – m’ont exposée ces dernières semaines à des attaques ne relevant plus de la polémique idéologique (celle-là très légitime) mais se muant en amalgames calomnieux (ceux-là inacceptables) et m’amènent à clarifier de manière très explicite, et définitive, ma position.

    Zone de contact

    Un article publié par la rédaction d’@si me prête avec Chouard une "proximité idéologique" que je démens catégoriquement. Je suis certes une militante du tirage au sort, la chose est tout à fait publique, mais cette orientation politique ne saurait me constituer en "chouardienne", et par voie de conséquence, me valoir procès pour les graves errements dont Etienne Chouard se rend coupable, et que j’ai dénoncés – trop mollement, apparemment.

    Il faut donc remettre de l’ordre (chronologique et théorique) dans cette pestilentielle polémique.

    J’ai découvert cette option politique (le tirage au sort) à travers Jacques Rancière, dans La Haine de la démocratie (2005); j’ai peu à peu pris connaissance d’une partie de l’appareil théorique disponible à ce sujet (Yves Sintomer, David Van Reybouck, Bernard Manin…) qui m’a semblé de robuste facture et m’a confortée dans l’intuition de la pertinence de cette option que je défends au M6R.

    Ce n’est qu’en 2012 que j’ai découvert le positionnement de Chouard, dans l’entretien qu’il a livré à Maja Neskovic pour @si. Le travail d’éducation populaire sur le processus constituant et les ateliers qu’il animait m’ont semblé porteurs de belles promesses démocratiques, et c’est la raison pour laquelle je l’ai interviewé en 2013 – en lui demandant déjà, entre autres, de s’expliquer sur le lien qui reliait son site avec celui d’Alain Soral, blogueur antisémite, homophobe, autoritariste et sexiste, trop influent pour n’être pas dangereux. J’ai eu la faiblesse, alors, de me contenter de ses mises au point – son approche humaniste du débat pluraliste, qui m’a semblé plausible à l’époque, mais que les événements récents font voir tout autrement. Je me suis montrée en la matière bien trop naïve.

    Histoire d'une dislocation

    La temporalité – des années pour lui faire enlever un lien (et avec quelles précautions!), quelques heures pour qu’il s’empresse de le remettre – indique des inclinations qui cadrent mal avec ses justifications: Chouard est bien assez connu désormais pour pouvoir être entendu sans passer par ce nauséabond mégaphone, et la revendication d’une pastorale transitant discrètement par toutes les voies se révèle être in fine le signe d’une alliance ostensible avec la position politique incarnée par le leader d’Egalité et Réconciliation – et ce, au moment où ce dernier entreprend de former un parti politique conçu pour la mise en œuvre d’un projet de pur despotisme.

    Quelques heures après, suppression de tous les liens, énième rétropédalage: ce comportement erratique, révélant à tout le moins une grande confusion intellectuelle, et sans doute la prise de conscience de ce qu’a d’intenable son projet démocratique de"réconciliation" avec le moins démocrate d’entre tous, trahit surtout ce que je n’avais pas voulu voir: sa complaisance désormais manifeste, et parfaitement inexcusable, pour le "soralisme", que je tiens, moi, pour une idéologie délirante, à vocation fasciste, et extrêmement dangereuse. La part que l’antisémitisme y prend la rend tout entière abjecte, et l’on ne saurait combattre aux côtés d’un "allié" dont les objectifs sont si évidemment contraires à ceux dont on se réclame.

    Complicité avérée avec des thèses délirantes

    C’est la raison pour laquelle je conteste catégoriquement qu’on me prête quelque "proximité idéologique" que ce soit avec Etienne Chouard. Je fais d’ailleurs observer que je ne l’ai mentionné dans aucun des textes par lesquels je me suis exprimée dans le cadre de mon engagement politique. C’est parce qu’on m’a sommée de me situer par rapport à lui que j’ai été amenée à préciser quelle "zone de contact" je pouvais avoir avec sa position (la promotion du tirage au sort), et j’ai à chaque fois pris soin de me démarquer de ce que j’appelais alors – trop indulgente moi-même - sa «coupable indulgence» vis-à-vis de Soral, qui apparaît désormais comme une complicité avérée avec des thèses délirantes.

    Je milite pour un processus constituant citoyen, pour une Constitution qui soit écrite par le peuple, pour le peuple, et un tel projet n’a pas besoin d’Etienne Chouard pour se construire – il a même besoin, désormais, d’être très clairement distingué de ses douteuses positions, car c’est salir la cause du processus constituant citoyen que de laisser croire qu’il aurait besoin des élucubrations de Soral pour prospérer.

    Au moment où j’écris ces lignes, Etienne Chouard parle de se mettre en retrait, de ne plus occuper pour l’heure de position publique, de fermer blog, page, et site; et c’est une très bonne chose. Sa position politique s’est disloquée à ce point d’achoppement des demandes de clarification. C’est donc que cette position n’était soit pas assez réfléchie, soit pas complètement avouable. Cette retraite s’offrira comme l’heure d’un inventaire scrupuleux, de la réflexion solitaire, enfin, et pourquoi pas de l’écriture d’un livre dont beaucoup attendent qu’il revienne enfin au cœur du seul combat qui mérite d’être mené: le processus constituant instituant la souveraineté populaire – et faisant le plus vigoureux barrage aux tentatives de capture fasciste de cette souveraineté.


    Par Judith Bernard le 02/12/2014


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  • Je veux exprimer sans tarder tout mon soutien à Judith Bernard.

    SOUTIEN TOTAL A JUDITH BERNARD ET ETIENNE CHOUARD!

    Je ne connais celle-ci que depuis peu. Depuis qu'elle a lancé, forte de sa légitimité de membre du Comité d'Initiative, le débat sur le tirage au sort au sein du Mouvement pour la 6ème République.

    Depuis, la question occupe toute la place des échanges au sein du mouvement. On peut dire même qu'elle fait des sacrés remous.

     

    Le tirage au sort (TAS) agit comme du poil-à-gratter, mettant dans l'embarras un mouvement pris en pleine contradiction. Entre d'un côté sa vocation affichée de redonner le Pouvoir, et en premier lieu la parole, au Peuple, et de l'autre son adossement indéniable à un parti (Parti de Gauche) avec le risque important de "pré-carrisation" (j'aime bien!) idéologique ruinant toute ouverture réelle et chance de rassembler.

    Un mur de détracteurs du tirage au sort n'a pas manqué d'apparaître pour faire avorter le débat. N'hésitant pas pour celà à recourir à ce qu'ils savent faire de mieux (c'est une pratique usitée dans les partis "de gôche"): le procès en fascisme sournois.

    Judith Bernard qui se retrouve, malheureusement pour elle, en porte-parole des "partisans" du TAS, en fait depuis quelques jours l'amère expérience.

    Elle est durement attaquée par une autre membre du Comité d'Initiative, Pascale Fautrier, qui n'a rien trouvé de mieux à faire, que de jeter l'opprobre sur elle en l'accusant de faire le jeu du fascisme en défendant le TAS! Elle brandit pitoyablement comme preuve la complaisance de Judith Bernard avec Etienne Chouard qui serait le cheval de Troie d'Alain Soral, antisémite désormais notoire.

    On retrouve là les procédés ridicules des militants "antifascistes" qui alignent les raccourcis puérils (untel a parlé avec machin qui est raciste donc untel sert le racisme) pour coller des étiquettes nauséabondes sur certains et disqualifier leur expression.

    Etienne Chouard subit depuis des années cette hostilité ridicule qui lui ferme des portes, alors même que l'intégralité de son discours est à l'évidence mû par des valeurs humanistes et égalitaristes.

    En attaquant Judith Bernard et Etienne Chouard, Pascale Fautrier nous attaque tous, nous qui croyons que le tirage au sort mérite mieux qu'une énième chasse aux sorcières des docteurs en bonne pensée. Et qu'il doit être sérieusement étudié car il semble offrir le moyen d'enfin faire trébucher les lobbies dans leur quête d'infiltration du pouvoir politique.

     

    De plus il semble aussi ouvrir la voie à une démocratie plus mature, où la politique n'est plus une affaire de confrontation systématique sur fond de compétition partisane, créant des passerelles nouvelles de dialogue entre citoyens en les affranchissant des postures de principe.

    Le tirage au sort pourrait ainsi être le mécanisme permettant une meilleure concorde nationale.

     

    DONC JE LE REDIS: ETIENNE, JUDITH VOUS AVEZ TOUT MON SOUTIEN. S'IL VOUS PLAIT, TENEZ BON!

     

    Comme disait Gandhi: "Au début, ils vous ignorent, ensuite ils se moquent de vous, après ils vous combattent et enfin vous gagnez"!!!


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